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Interview

M. Castelain vous avez un parcours riche de diverses expériences, à la fois professeur, médiateur et ancien directeur d’une compagnie de protection juridique, quel est le fil de ce parcours ?
Effectivement, je semble assembler plusieurs expériences, mais le fil entre celles-ci me paraît évident. En effet, la première expérience, soit celle de l’enseignement vise l’émergence des savoirs parfois abstraits qui ne se peut que dans un espace de bienveillance et de mise enconfiance.
La seconde, celle de la pratique de l’assurance de protection juridique, consiste à aider une personne à faire valoir ses droits à travers des abstractions et des vérités juridiques qu’elle n’appréhende pas nécessairement. A travers une didactique du droit, il convient de réconcilier la personne avec le concept du juste en créant un espace de conciliation. La médiation est un peu une synthèse de tout cela, sorte de mise en place d’un cadre où le conflit se comprend aussi à travers les yeux de l’autre, dans une mise à disposition des outils juridiques, psychologiques et autres, avec le souci d’offrir des espaces de créativité qui puissent produire des liens soigneusement remaillés.
Alors qu’est-ce ADR consult ? Qu’elle est son essence ?
Ce sont d’abord trois lettres qui ne suivent pas l’ordre logique de l’alphabet, car pour bien comprendre, il faut parfois lire suivant un ordre modifié, ceci, c’est pour l’aspect symbolique des choses. Il est exact aussi qu’il s’agit d’un acronyme de langue anglaise Alternative Dispute Resolution qui signifie en français Mode alternatif de résolution des conflits. Quant à la consultance, elle signifie qu’elle ne s’inscrit pas dans un rapport hiérarchique mais dans celui d’un tiers intercesseur qui cultive écoute active et bienveillance. Dans le domaine du coaching en entreprise, ceci pourrait s’appeler le management participatif (on y trouve en tout cas un concept voisin).
Pour conclure, un principe qui motive vos actions ?
Lorsque mon père s’en est allé, ma famille et moi avons fait graver l’un de ses principes les plus chers sur sa tombe : « Agis comme ton devoir te l’ordonne et laisse les gens parler ». Pour mon père, il voyait ce devoir comme un impératif personnel de justesse qui ne pouvait céder devant la rumeur. A propos de mon principe d’action, j’aurais tendance à conserver le même, Le devoir, je le vois et le précise comme ceci soit de mettre à disposition ce que je pense le mieux faire (ce qui est à peu près la même chose) avec cette différence sur la deuxième partie de la proposition, soit que la médiation est une invitation à faire oser parler les gens, dans la confidence et la confiance, là où nous sommes, aussi, très éloignés de la rumeur déformante.
En somme, vous êtes une sorte d’acteur alternatif de la pratique du droit ?
Oui, j’accueille cette appellation, non que je conteste l’institution judiciaire, tout au contraire, mais il faut lui laisser l’espace matériel de faire évoluer le droit à travers des débats de fond, La justice continuera ainsi de fonctionner comme un troisième pouvoir jamais avare de créativité. Encombrer la justice de litiges qui peuvent se régler autrement ne permet pas un exercice serein de celle-ci. Comme d’autres l’ont déjà rappelé, « la maladie ne relève pas nécessairement de la compétence des hôpitaux et des urgences, heureusement qu’il y a la médecine ambulatoire et c’est pareil dans le domaine qui nous occupe ici, tout litige ne nécessite pas l’intervention de la justice, heureusement qu’il y a des acteurs alternatifs et de proximité. »
Quels sont pour vous les clés d’une médiation réussie ?
celle-ci peut être évidemment objectivée par un accord de médiation signé (homologué par le tribunal ou non) et qui constitue le socle consensuel des parties. Les statistiques de réussite varient, suivant les sources, entre 70 et 80%.
Mais pas seulement, il est des cas (sans signature d’accord) où la douleur d’un ressenti, jamais exprimé, est à son comble alors que la personne qui la vit n’a jamais pu l’exprimer, au ou à la partenaire. Dans le cadre du trialogue de médiation, cette catharsis trouve un terrain d’écoute et de reconnaissance de la souffrance. On ne sort pas le ou la même d’un pareil processus de sorte que l’on ne peut parler d’échec même si une signature d’accord n’intervient pas. La personne en souffrance sait alors que la douleur ne relevait pas de la simple représentation mentale.
Je voudrais ajouter aussi, que dans certains litiges comme le voisinage, le droit ne dispose pas toujours des outils adéquats pour les résoudre, puisque la détermination d’un fautif est souvent illusoire en raison de l’accumulation de malentendus. Dès lors, si l’affaire va en justice, et est tranchée en faveur de l’un ou l’autre des voisins, il n’est pas rare, de voir le voisin condamné revenir devant le juge avec un autre motif, on parle alors de litige récurrent. Par contre, la médiation, grâce à la systémique, permet d’aller au fond des choses et d’ainsi expurger le problème.
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